Le 14 juillet, la France apprenait le décès de Thierry Ardisson, figure iconique du paysage audiovisuel français. C’est sa compagne, la journaliste Audrey Crespo-Mara, qui a officialisé la nouvelle auprès de l’AFP. Atteint d’un cancer du foie, l’homme en noir savait sa fin proche depuis plusieurs jours et avait tout anticipé. Publicitaire de formation, animateur de talent et obsessionnel du contrôle, il n’a laissé aucune place au hasard.
De ses obsèques à l’encens utilisé, en passant par les témoignages posthumes, tout avait été méticuleusement orchestré. Parmi les instructions qu’il avait laissées : une liste de sept personnalités que les journalistes devaient impérativement contacter pour recueillir des témoignages. Et ce, immédiatement après l’annonce de sa mort par l’AFP. Une ultime mise en scène, signée Ardisson.
Sur le même sujet
Une communication millimétrée, pensée bien avant le dernier souffle
Jusqu’à son dernier jour, Thierry Ardisson aura démontré une rigueur extrême dans la gestion de son image. Mais ce souci du détail n’a pas faibli à l’heure de sa mort. Un dossier avait été préparé pour les médias, à remettre dès la diffusion de la dépêche de l’AFP. À l’intérieur, figuraient les noms et numéros de téléphone de sept personnes triées sur le volet. Identifiées comme les « témoins autorisés » de sa vie publique et privée. Une manière pour Ardisson de contrôler le récit qui allait émerger autour de sa disparition.
Parmi ces personnalités : le journaliste Franz-Olivier Giesbert, la productrice Catherine Barma, la communicante Anne Méaux, et Marie-France Brière, sa première patronne dans l’audiovisuel public. Toutes figuraient dans cette short list conçue comme un cercle d’intimes. La journaliste Léa Salamé, également citée, s’est quant à elle montrée surprise d’y figurer. « Je n’étais pas une proche de Thierry, pas plus qu’avec son épouse », a-t-elle confié, évoquant comme seule explication leurs dernières interviews qu’il aurait beaucoup appréciées.
L’obsession du contrôle d’Ardisson, jusque dans la postérité
Mais ce besoin de maîtrise n’est pas une surprise pour ceux qui connaissaient Ardisson. Déjà de son vivant, il imposait des règles strictes sur les tournages de ses émissions. L’exemple le plus marquant reste sans doute le fameux « skin control ». Un filtre d’image qu’il avait introduit bien avant l’explosion des filtres numériques grand public. Ce procédé, inédit à l’époque, permettait d’estomper ses rides à l’écran, lui offrant une apparence lissée. Une exigence esthétique qui ne s’appliquait qu’à lui, créant un contraste souvent visible avec ses invités. Cette coquetterie assumée illustrait son rapport très personnel, voire presque maniaque, à l’image qu’il renvoyait.
Mais cette volonté de contrôler sa représentation s’est prolongée après sa mort. Le kit envoyé à la presse contenait également des photos validées par ses soins. Ainsi que seize minutes d’extraits d’émissions, soigneusement sélectionnés par l’animateur lui-même. « Aucun autre extrait n’est autorisé », précise Le Parisien. Ce best-of sur mesure, pensé comme un résumé parfait de son œuvre télévisuelle, illustre l’exigence d’Ardisson. À savoir, ne laisser paraître de lui que ce qu’il jugeait digne de l’être. À travers cette gestion millimétrée de son héritage médiatique, l’homme en noir démontre qu’il a su écrire sa sortie comme un dernier numéro parfaitement scénarisé.